Littérature Jeunesse — par Raphaele Botte


Petite enfance

Nez bouché, lunettes, bonnet de bain. Tout commence ici par une plongée et dans le bleu
des eaux marines, on croise un ours blanc, un morse, des manchots… Quelle liberté, quelles
sensations ! Les bulles d’air viennent chatouiller le corps. Au milieu du livre, le lecteur doit
retourner le livre et quelques plages plus loin, la chute éclate. La plongée n’était pas tout à
fait dans la banquise. Classiquement, ce cartonné pour tout petit explore un moment de la
vie quotidienne mais grâce à sa forme, il renouvelle le genre. L’économie de mots et la
malice des images suffisent à enclencher l’imaginaire.

Encore un plouf, Isabelle Riq, Seuil Jeunesse, 24 p., 9,90 €


Album

Dans la pénombre de la chambre, poupées, pieuvre, tirelire cochon et même chat ont les
yeux rivés sur ce qu’il se passe. Le pantalon s’est dressé, les bras du pull sont en l’air…
Diantre, le titre de cet album annonçait bien la couleur : La nuit où mes vêtements se sont
échappés. Il suffit de se nouer pour enjamber le rebord de la fenêtre et filer dans la forêt. La
simplicité d’un trait bleu jeté et des fonds texturés aux tons soutenus participent à parer cet
album d’une atmosphère aussi forte et mystérieuse qu’impalpable. Des faux airs de
silhouettes fantomatiques, un vif esprit de liberté, des objets du quotidien dotés d’une âme
rendent cet album très singulier. Avec ce tout premier album jeunesse publié, Charlotte de
Sédouy explore à sa manière le quotidien, les peurs, le désir d’émancipation et convoque
même subtilement – et peut-être bien inconsciemment d’ailleurs ! – l’immense classique
du genre Max et les maximonstres de Maurice Sendak (1963).

La Nuit où mes vêtements se sont échappés, Charlotte de Sédouy, Albin Michel jeunesse, 32
p., 16,90 €.



Album

Une cafetière, une carte, une gourde, un bâton, un doudou, une brosse à dent, un gros sac à
dos… C’est une vraie liste de tout ce qu’il ne faut pas oublier pour partir en expédition. Ici,
c’’est un père qui a décidé d’emmener ses deux fils titiller le canoë et découvrir la rivière. On
sent que ce papa en rêve depuis longtemps ! Voici le trio infernal à bord, sanglés dans les
gilets de sauvetage et armés de pagayes. D’un trait noir lancé, immensément joyeux,
agrémenté et d’une mise en couleur printanière,
Alice Ourghanlian embarque le lecteur au côté de ses personnages.
Une briquette de jus d’orange au sol, une goutte de transpiration,
un éclat de voix entre frères, le son d’une radio le temps de la sieste… Tous ces détails
participent à la justesse de ce très bel album. Le rythme des pages s’appuie sur différents
codes : celui de la bande dessinée, de l’observation naturaliste, et même du cherche-et-
trouve. Le lire est une balade le long de la rivière…

Un long week-end en canoë, Alice Ourghanlian, helium, 56 p., 15,90 €.


Roman junior

Fini l’iPhone. Inquiétude et ras-le-bol cumulés, les parents d’Ylies ont sévi et ont confisqué
l’appareil responsable de tous les mots. La punition est large : le petit gars de 9 ans a comme
défi de se faire un vrai ami et ils lui demandent en plus, sur les conseils d’un psy,
d’enregistrer ses réflexions sur un dictaphone. Le grand intérêt de ce roman pour jeune lecteur autonome
réside sur le jeu avec l’oralité. Le ton sonne juste, rappelant les grandes heures du Petit Nicolas.
Et bien sûr, l’humour ouvre tout un pan de réflexion !

À l’écoute, de Thomas Gornet, éd. du Rouergue, 112 p., 9,90 €. Dès 8 ans.


Roman ado

Le feu crépite plus rarement. Les repas sont moins copieux. Mère passe son temps à écrire
et Père a disparu… La vie de Roberta, Peter et Phyllis a bien changé depuis leur départ de
Londres pour la campagne mais jamais, ils n’oublieront leurs nouvelles aventures le long du
chemin de fer… Douceur et joie enveloppent cette histoire de fratrie.
Edith Nesbit fut parmi les grandes pionnières à débarrasser les romans jeunesse de propos moraux et éducatifs
et ce classique britannique (1905) a été traduit pour la première fois en français.
Et il est réellement intemporel…

Les enfants du chemin de fer, d’Edith Nesbit, traduit de l’anglais par Amélie Sarn, éd. novel,
304 p., 15,90 €. Dès 10 ans.



Roman ado

Un coup d’œil sur la couverture de ce roman étonne l’œil averti… Inspirée par une toile de
Gustave Courbet, elle met en scène un homme endormi mais qui est cette femme vêtue de
rouge à ces côté. Il fallait bien cette couleur vive pour la rappeler à l’existence. Elle avait été
effacée par l’artiste… Marine Carteron – grande plume du roman ado remarquée notamment
avec Les Autodafeurs sorti en 2014 – emporte cette page de l’histoire de l’art passionnante du côté
du roman adolescent en plongeant une jeune fille
de 17 ans dans les couloirs déserts d’un musée d’Orsay fermé.

Les Effacées, de Marine Carteron, éd. du Rouergue, 150 p., 14 €

Raphaele Botte
Author: Raphaele Botte

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